L’affaire du décapité de Wassigny : rapport de médecine légale par le docteur Auguste Penant

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30 janvier 1881, sept heures et demie du soir, Wassigny ; c’est à la lueur des falots que le docteur Auguste Penant se rend, sur réquisition du juge d’instruction, sur le lieu du crime. Un homme a été décapité et son cadavre gît sur le sol d’un chemin rural menant au hameau dit le Rejet-de-Beaulieu. La victime, que l’on ne peut reconnaître qu’à ses vêtements, est un manouvrier de 33 ans. Un croquis est rapidement réalisé sur une feuille de papier. Le but de cette première visite est de constater la position du corps et de dresser un rapide état des lieux ; les opérations définitives sont remises au lendemain dès 8 heures du matin.

Le crime laisse des marques sur le corps et les objets. Ces dernières deviennent des indices précieux pour les enquêteurs et permettent aux magistrats de les relier à l’acte criminel et d’approfondir leur investigation. Quand la mort est-elle survenue ? Avec quel(s) instrument(s) a-t-elle été donnée ? Des luttes ont-elles eu lieu entre la victime et le bourreau ? Mandaté par un magistrat dans ce cas précis, le médecin légiste doit répondre à ces questions à partir des vestiges concrets du meurtre.  Il donne dans son rapport écrit ses constatations et son opinion motivée et indépendante quant au meurtre.

Au XIXe siècle, dans un contexte d’évolution de la législation concernant les délits et les peines, les médecins légistes deviennent les compagnons indispensables des juges pénaux et civils. On constate à partir de 1850 un accroissement du nombre de monographies médico-légales, tandis que les rapports médicaux deviennent de plus en plus complexes et précis. Dans son rapport, le docteur Penant fait état de la rigidité du cadavre, de l’état de la décomposition, de la putréfaction et des différentes plaies et contusions qui parsèment le corps de la victime. Dans ses conclusions, il détermine :

  •  à partir des plaies que la mort a été instantanée,
  •  à partir des aliments non digérés dans l’estomac qu’elle est survenue récemment,
  •  à partir des sections des chairs et os le type d’arme utilisé
  •  et par la position du cadavre la nature traitreuse du meurtre.

Discipline scientifique au service de la Justice, point de rencontre entre la médecine, le droit et l’éthique, l’expertise médico-légale s’est considérablement développée en parallèle de l’évolution des connaissances biologiques, physiques, chimiques, techniques et sociales de notre temps.

Pour en savoir plus sur l’histoire des soignants dans l’Aisne, leurs pratiques, leur rôle social et leurs lieux de travail, les Archives départementales de l’Aisne vous invitent à découvrir l’exposition "Dites 33, 700 ans de soins dans l'Aisne" du 26 mai au 30 novembre 2023 au Centre des Archives et de la Bibliothèque départementales de l’Aisne (accès gratuit).

 

Documents :

Ce document est issu d’un registre de rapports médico-légaux de 380 pages divisé en cinq chapitres : attentat aux mœurs, viols, sodomie, impuissance (1) ; avortements, accouchements, péritonite (2) ; infanticide (3) ; fractures du crâne (4) ; plaies pénétrants du cou, de la poitrine, de l’abdomen (5). Entré par voie extraordinaire, il est conservé aux Archives départementales de l'Aisne sous la référence 1J367.

(1)  croquis du cadavre décapité de l’affaire de Wassigny

(2)  rapport de médecine légale du docteur Auguste Penant sur l’affaire de Wassigny