Le problème des sépultures militaires

Plan d'aménagement

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Ce projet d'aménagement de "tranchées" pour les soldats français et étrangers, dû à l'architecte de la ville de Laon, Jean Marquiset est intéressant à plusieurs titres.
Sa date -5 novembre 1918- le place encore dans l'actualité "brûlante" de la guerre qui s'achève une semaine plus tard. La ville de Laon, encore largement sinistrée, n'est libérée que depuis trois semaines (13 octobre 1918).
Le nombre et la répartition des tranchées sont révélateurs des mentalités de cette époque : trois tranchées pour les Américains, une pour les Anglais, deux pour les "Noirs", une pour les Italiens, et un nombre indéterminé pour les Français.
Les Américains semblent sur-représentés par rapport aux troupes engagées, cela est peut-être lié à l'éloignement du pays natal qui explique qu'un nombre plus restreint de corps soient rapatriés et à leur participation significative dans les batailles locales, et en particulier sur le Chemin des Dames...
Les Anglais ne disposent que d'une seule tranchée mais il est vrai qu'ils se sont majoritairement battus plus au nord-ouest, dans le Nord-Pas-de-Calais et la Somme.
Les Italiens se voient gratifiés d'une tranchée, laissée vacante initialement, prise en compte tardive de leur participation aux combats ultimes du Chemin des Dames et à la libération de Laon.
Les autres alliés -Russes, Néo-zélandais, Australiens, etc.- semblent avoir été oubliés.
Une tranchée a été primitivement réservée aux Allemands puis rayée, car deux cimetières militaires strictement allemands vont être aménagés ou développés : le cimetière de Bousson qui, paradoxalement, est le principal espace commémoratif de la Première Guerre mondiale subsistant à Laon et celui du Champ de Manœuvres à Clacy-et-Thierret.
Pour des raisons faciles à comprendre, les Français se voient attribuer le plus large espace, mais la plupart des corps finiront par être inhumés dans leur commune d'origine ou de résidence de leur famille si elle diffère, ou bien encore dans les cimetières nationaux qui se mettent en place au cours des années 1920.
Finalement, la principale "curiosité" de ce document à nos yeux, est la place réservée aux "Noirs". Leur nationalité semble s'être dissoute, la couleur de leur peau devenant leur seule "patrie". Le gris du crayon de papier remplace sur leurs tranchées les couleurs des drapeaux nationaux. Le soldat noir, qu'il soit américain ou membre des troupes coloniales françaises ou britanniques, est encore dans l'opinion publique du début du siècle, un objet de "curiosité", un citoyen "à part".

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Rapport du gardien du cimetière

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Ce document nous présente les problèmes concrets que représente l'aménagement de sépultures militaires dans un cimetière civil.
Le principal cimetière de Laon connaît une activité exceptionnelle en cette fin d'année 1918. Les fossoyeurs habituels ne sont peut-être pas encore rentrés ou ont disparu, et de toutes façons, ne seraient pas assez nombreux.
Des prisonniers allemands sont donc mis à disposition par l'autorité militaire, mais ils ne paraissent guère enthousiastes ni doués pour cette tâche, d'autant plus qu'ils ne comprennent pas les directives.
Le gardien du cimetière semble donc à bout de nerfs, exaspéré par la multiplication des incidents -comme celui relaté dans le document- qui entachent le sérieux du cimetière et perturbent le recueillement des familles

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Lettre du ministère des Pensions

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Cette lettre du ministère des Pensions illustre bien les difficultés de l'État pour assumer le coût considérable de création et d'entretien des tombes militaires.
Ainsi, tout en reconnaissant que ces frais sont à la charge de la Nation, le ministère n'hésite pas à demander au modeste faubourg de Vaux-sous-Laon, pourtant très sinistré comme l'ensemble de la ville de Laon, de faire abandon du remboursement auquel il aurait droit.
Cette requête ministérielle se retrouve dans d'autres communes de l'Aisne, pourtant exsangues au lendemain d'une guerre qui a plus touché ce département qu'aucun autre en France. La "piété patriotique" est à chaque fois sollicitée, avec plus ou moins de bonheur, dans des communes durement touchées par le conflit et l'occupation, encore en plein effort de reconstruction.

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