Le général de Wimpffen et la bataille de Sedan

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Le 1er septembre 1870, la bataille de Sedan scelle le destin de Napoléon III et permet la proclamation de la République trois jours plus tard. Comment un régime politique comme le Second Empire peut-il s’effondrer aussi rapidement ?

 

Depuis des années, de l’autre côté du Rhin, le chancelier Bismarck veut faire l’unité de l’Allemagne au profit de la Prusse et de son souverain Guillaume Ier. Après la guerre des duchés en 1864, la Prusse se retourne contre l’Autriche et lui inflige une terrible défaite à Sadowa le 3 juillet 1866. Cette bataille a un grand retentissement en Europe et notamment en France, car elle démontre la puissance militaire de la Prusse et marque la fin de l’influence autrichienne en Allemagne. Bismarck va amener ensuite les états allemands du sud, notamment la Bavière, le pays de Bade et le Wurtemberg, à adhérer à son projet d’unité au profit de la Prusse. La guerre contre la France doit servir d’élément fédérateur. Dès lors, elle est programmée et la dépêche d’Ems entraîne la France dans une guerre que son souverain ne veut pas.

 

Malgré son ardeur au combat, l’armée française subit plusieurs revers aux frontières qui marquent son recul face aux troupes prusso-allemandes. Bazaine se laisse enfermer dans Metz et l’armée de Mac-Mahon, reformée à Châlons, essaie de lui porter secours. Toutefois, avec la défaite de Beaumont, elle se regroupe à Sedan. Très vite, l’ennemi manœuvre habilement afin d’encercler l’armée française dans la cuvette de Sedan et fait donner sa puissante artillerie. C’est un déluge de fer et de feu. Les Français sont balayés et malgré une tentative de sortie vers Balan, le drapeau blanc est hissé. La capitulation de la place est signée le lendemain et l’armée de Châlons, avec ses chefs et son empereur, est envoyée en captivité en Allemagne.

 

Cette défaite de Sedan, véritable traumatisme pour l’armée française, est à l’origine d’une polémique qui perdurera longtemps après l’événement et se terminera par un procès judiciaire.

 

En effet, durant la bataille, trois commandants en chef se sont succédé. Mac-Mahon, blessé en début de matinée, passe le commandement au général Ducrot qui ordonne un retrait des troupes vers Mézières. Mais le général de Wimpffen[1], arrivé la veille, exhibe un ordre du ministre de la Guerre qui lui enjoint de prendre le commandement en cas d’empêchement de Mac-Mahon. Il arrête la retraite sur Mézières et ordonne de nouvelles attaques pour percer les lignes ennemies et donner la main à Bazaine.

 

La responsabilité de la défaite repose sur Wimpffen, son dernier commandant en chef, qui accuse de son côté ses lieutenants de ne pas avoir suivi ses ordres. Très affecté par le fait d’avoir dû apposer son nom au bas de l’acte de capitulation et par les critiques qui s’élèvent quant à la manière dont il a exercé son commandement, il entreprend en captivité d’écrire sa version de la bataille. En août 1871, son ouvrage sur la bataille de Sedan paraît en librairie et il en envoie un exemplaire à Bismarck qui le remercie et le lave de tout reproche. Son livre est un réquisitoire contre Napoléon III et Mac-Mahon. Cependant, en décembre, si le conseil d’enquête sur les capitulations rend bien responsable Napoléon III de la capitulation, il critique aussi sévèrement l’attitude du général de Wimpffen lors de la bataille. Ce dernier demande alors peu après sa mise en retraite. Néanmoins, son attachement au régime républicain lui attire l’animosité des milieux bonapartistes et notamment celle de Paul Granier de Cassagnac qui, dans son journal Le Pays, fustige l’action du général à Sedan. Wimpffen porte plainte pour diffamation et la cour d’assises de Paris revisite en 1875 la bataille de Sedan à la lueur des témoignages des généraux français qui y participèrent. Le verdict acquitte le journaliste pamphlétaire. C’est un camouflet pour Wimpffen et le parti républicain qu’il pouvait représenter tant les débats s’apparentaient en une lutte entre deux courants politiques : le parti bonapartiste et le parti républicain.

 

 


[1]. Emmanuel Félix de Wimpffen est né à Laon le 13 septembre 1811 d’un père colonel, mort en 1813 des fatigues de la campagne de Russie, et d’une mère hollandaise. Saint-cyrien, il est versé dans l’infanterie et passe dix-sept années en Algérie. Général de brigade durant la guerre de Crimée, il est fait général de division en 1859. À la veille de la guerre franco-allemande, il prend la tête d’une expédition sur l’oued Guir qui assurera la tranquillité de la région d’Oran lors des insurrections arabes de 1871.