L’église Saint-Médard de Prisces, la plus haute église fortifiée de Thiérache

2225 W 1542
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L’église de Prisces a été édifiée au XIIe siècle, ce dont témoignent ses pierres de taille qui datent pour l'essentiel de cette époque. Son donjon, en brique rouge, date du début du XVIIe siècle. Il a été érigé juste après le traité de paix de Vervins en 1598. Du haut de ses 25 mètres, on ne peut pas le manquer : il est le plus haut de Thiérache ! Sa construction a probablement été inspirée par l’église Saint-Corneille-et-Saint-Cyprien d’Hary, située à quelques kilomètres de Prisces. Le donjon de l’église d’Hary mesure 16 mètres de haut et est identique en plusieurs points à celle de Prisces, ce qui en fait presque des églises jumelles...


L’église de Prices est fortifiée pour une défense active en vue de tenir face à des assaillants. Ce type d'aménagement pouvait transformer ces lieux sacrés en de véritables ouvrages militaires. Le donjon a été construit au-devant de la nef, mais sans la cacher. La construction est imposante, très large, sept mètres sur sept, et possède trois niveaux supérieurs. Ces derniers ont été construits pour accueillir un maximum de personnes et résister le plus longtemps possible. Deux tours sont disposées de chaque côté, dans lesquelles des meurtrières ont été aménagées. La tour de gauche était occupée par les postes de combat, qui s’élevaient sur quatre niveaux, tandis que, dans la tour de droite, un escalier permet l'accès au sommet du donjon, qui lui-même ouvre vers les combles de la nef.


Les églises fortifiées voient le jour au Moyen-Âge, dès le Xe siècle. Souvent méconnues du grand public, elles ne sont pourtant pas cantonnées à une région précise. On en trouve dans plusieurs provinces ayant souffert d’invasions comme dans la Loire ou en Bretagne. Elles n’ont en revanche pas toutes été construites selon le même modèle. Certaines sont fortifiées dès leur construction, d'autres après. Les églises fortifiées jouent ainsi un rôle de refuge. En période de guerre ou de pillage, la population pouvait s'y mettre à l'abris. Cette pratique est liée à la protection particulière apportée par les églises : depuis le Ve siècle, les soldats ont interdiction de piller les lieux consacrés. 


Le département de l’Aisne possède un grand nombre d’églises fortifiées. Plusieurs facteurs expliquent cette situation. La province se trouve dans un carrefour des routes reliant l’Europe du Nord et l’Europe du Sud, c'est une zone frontière proche de l’Angleterre, du Hainaut et de la Flandre : elle constitue ainsi une place stratégique pendant la guerre de Cent Ans, notamment pour assurer la défense de Paris. L'Aisne a à ce titre souffert des premières chevauchées anglaises. Pourtant, les églises de Thiérache sont postérieures à ces événements : elles n’ont été fortifiées pour la plupart qu’au XVIe siècle. En pleine guerre de religions, la Thiérache attire les pilleurs, car elle est un grenier un blé. La population doit se défendre pour éviter le risque de pénurie alimentaire. La province souffre enfin des passages quasi-ininterrompus des troupes armées de François Ier et de Charles Quint. Ce sont principalement ces derniers qui ont mené à une campagne de fortification des églises.


Cette histoire mouvementée a transformé le paysage de Picardie, laissant un patrimoine architectural unique encore visible aujourd'hui. Des programmes de mise en valeur permettent d'en faire découvrir la richesse et d'en améliorer la connaissance : le Département de l'Aisne est particulièrement impliqué dans cette politique, comme en témoigne l'action du service de Conservation du patrimoine historique et mobilier de l’Aisne, dont sont issues les photographies qui vous sont présentées.