Quand l’urinoir arrive en ville, les passants salissent moins les trottoirs

E-dépôt Château-Thierry 534, non coté
E-dépôt Château-Thierry 534, non coté
E-dépôt Château-Thierry 534, non coté
E-dépôt Château-Thierry 534, non coté
E-dépôt Château-Thierry 534, non coté
E-dépôt Château-Thierry 534, non coté

Voir toutes les images (6)

Quand l’urinoir arrive en ville, les passants salissent moins les trottoirs

Un projet d’installation d’urinoir sur le pont de la Marne à Château-Thierry

 

Avant le XIXe siècle, un passant pris d’une envie pressante n’a d’autres choix que de se soulager là où il le peut, dans la rue ou les jardins. Certes, certaines villes aménagent de rares lieux dédiés à l’évacuation des déchets organiques, mais les solutions proposées sont rarement pérennes. Au XVIIIe siècle Louis XV tente même d’interdire officiellement de se soulager dans la rue, poussant savants et autorités à imaginer des dispositifs pour collecter ces déchets.

 

En 1834, un an après la fin d’une épidémie de choléra particulièrement meurtrière, le préfet de Paris, Claude-Philibert Berthelot, comte de Rambuteau, et une équipe de savants créent dans la capitale les premières véritables toilettes publiques depuis la fin de l’Antiquité. Cette mesure s’inscrit dans le contexte de la montée des idées hygiénistes auprès des élites sociales. Elle rencontre rapidement un certain succès : les passants prennent l’habitude de se soulager dans ces vespasiennes (appelées aussi colonne Rambuteau) et les rues de Paris sont moins sales qu’autrefois. Elle connaît néanmoins des limites : ces urinoirs sont adaptés à la seule morphologie masculine et les femmes en sont donc écartées.

 

Bien sûr, les toilettes publiques ne pouvaient rester cantonnées à la seule capitale. Des colonnes Rambuteau sont progressivement installées dans la plupart des villes tout au long du XIXe siècle. C’est ainsi que Château-Thierry s’en dote à son tour. En 1880, le Maire de la ville charge un architecte d’installer des urinoirs en forme de guérite ou de kiosque sur les trottoirs du grand pont de la Marne.

 

De ce projet, il nous reste cinq documents.

- Une première lettre (1) de l’architecte expose au Maire les différents modèles de vespasiennes existant à Paris avant de préciser lequel conviendrait pour le pont de la Marne et le coût de l’opération d’installation.

- Deux plans sont joints à ce courrier : le premier (2) présente sous forme de coupe en élévation le modèle de colonne Rambuteau retenu pour le projet de Château-Thierry ; le deuxième (3) montre la grille d’évacuation des urines.

- Dans une nouvelle lettre (4), l’architecte explique qu’une commission a approuvé le projet sous réserve d’installer dans la vespasienne deux stalles, ce qui va augmenter le coût des travaux.

- Pour mettre en œuvre cette décision, il dessine sur une feuille de retombe une nouvelle grille d’évacuation d’urines adaptée pour deux stalles (3).

- Enfin, il dresse un plan (5) du pavillon où serait installé l’urinoir pour deux personnes.

 

Le dossier conservé par les Archives départementales ne précise pas si l’urinoir a bien été construit. Les cartes postales anciennes montrant le pont de Château-Thierry ne semblent pas figurer un tel équipement. Ce projet n’en témoigne pas moins d’une tendance générale des villes à la fin du XIXe siècle à se doter d’équipements et de mobiliers urbains en vue d’améliorer l’hygiène publique.

 

Sources :

https://www.lavenir.net/actu/societe/2018/02/17/petite-histoire-quand-sont-nees-les-toilettes-publiques-NCN5WWTK5JH3VHCP34Q6S3JOUQ/

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-pourquoi-du-comment-histoire/comment-faire-l-histoire-des-toilettes-publiques-9631095

https://www.radiofrance.fr/franceculture/de-l-amphore-aux-sanisettes-l-histoire-parfois-erotique-des-toilettes-publiques-1990689

Outre ces liens, nous pouvons conseiller le livre de Roger-Henri GUERRAND, Les lieux, une histoire des commodités, La Découverte, 1985.